Jeudi, deux systèmes principaux vont dicter le temps en Europe : un anticyclone centré sur l’Angleterre et une dépression sur le sud-est de la Méditerranée (voir Figure 1). La côte croate est prise en étau entre ces deux systèmes et on constate un gradient de pression relativement important qui force un vent de secteur nord-est sur le nord de l’Adriatique : c’est l’origine du Bora. Cette situation conduit également à de la Bise sur le Plateau Suisse et du Mistral dans la vallée du Rhône française. Pour plus d’informations sur ces trois vents qui sont étroitement liés, nous vous proposons la lecture de ce blog de 2023.

Le vent en altitude résulte principalement d’un équilibre entre le gradient de pression et la force de Coriolis (voir vent géostrophique). Dès lors, la circulation du vent à une altitude donnée peut être déduite simplement avec une carte de pression ou de hauteur du géopotentiel. Le vent souffle dans le sens horaire autour d’un anticyclone et anti-horaire autour d’une dépression (dans l’hémisphère nord). Il souffle parallèlement aux isobares, comme on peut le constater dans la Figure 1. La force du vent est directement proportionnelle au gradient de pression : plus les lignes sont serrées, plus le vent est fort. A noter que cela est valable pour le vent en air libre, c’est-à-dire sans influence du terrain.
Sur la Figure 2, on voit bien qu’une situation de Bise aura lieu sur le Plateau Suisse, ainsi que du Mistral dans la vallée du Rhône française. On constate également un fort vent du nord-est sur la côte croate qui s’étend à travers l’Adriatique. Les rafales le long de la côte sont prévues bien plus fortes que la Bise et le Mistral. Pourtant, le gradient de pression visible sur la Figure 1 n’est pas significativement plus fort sur la côte croate que sur le Plateau suisse ou la vallée du Rhône. Qu’est-ce qui fait que la Bora est prévue de souffler si fort ? La réponse se trouve dans la topographie des Alpes dinariques et est présentée dans la section suivante.
Les Alpes dinariques, qui s’étendent de la Slovénie à l’Albanie, présentent une pente très forte le long de la côte croate : la Bora est accélérée par gravité et fait donc partie des vents dits catabatiques, comme le Joran. Ce sont des vents dont l’écoulement est principalement le résultat d’une masse d’air refroidie, et donc plus dense, qui s’écoule le long d’une pente. Les habitants du pied du Jura le connaissent bien sous le nom de Joran, par exemple à l’arrière d’un front froid dont l’air s’écoule le long du Jura. La Bora est d’une toute autre ampleur, de par la configuration des Alpes dinariques et le potentiel d’air froid continental en provenance d’Europe de l’est.
L’animation de la Figure 3 montre la prévision du vent sur le nord de l’Adriatique pour jeudi. On distingue bien les fortes rafales de plus de 100 km/h le long de la pente jusque sur la côte. On remarque également la présence de quatre jets qui s’étendent à travers l’Adriatique : ce sont des zones de forts vents qui sont canalisés par le relief côtier. Entre ces jets, on voit que le vent est bien plus faible. Cela rend la navigation potentiellement dangereuse en situation de Bora, car on peut subitement passer d’une zone calme à une zone de tempête. Ces quatre jets prennent le nom de leur origine sur la côte et se nomment du nord au sud : jet de Trieste, de Senj, de Karlobag et de Drage.
Les rafales prévues jeudi dépassent localement les 100 km/h, mais dans des cas plus extrêmes, en particulier en hiver, la Bora peut souffler jusqu’à 180 km/h.

Pour conclure ce blog, nous vous rassurons que la Bise ne soufflera pas autant fort que la Bora et que nous nous attendons à des rafales maximales jeudi de l’ordre de 40 à 55 km/h.