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Le vent souffle… mais quel vent ? – Partie 1

MétéoSuisse-Blog | 23 janvier 2024
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Vent d'ouest au Nord, foehn au Sud... en ce début de semaine, il souffle dans pratiquement dans toute la Suisse. Profitons de la circonstance pour reprendre un blog de nos collègues tessinois consacré à ce phénomène fascinant et parfois très turbulent.

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La série #lameteospiegata ("la météo expliquée"), une collaboration fructueuse entre RSINews et nos collègues de Locarno-Monti, s'est achevée en décembre dernier. Récemment, les 18 épisodes ont été rassemblés sur une seule page (en italien) pour faciliter les recherches et les références.

Dans le blog d'aujourd'hui, et deux autres à venir prochainement, nous présenterons l'épisode sur le vent. Entrons ensemble dans la caverne d'Éole !

"Godi, se il vento ch'entra nel pomario / vi rimena l'ondata della vita" (In Limine, Ossi di Seppia, 1925)
"O rabido ventare di scirocco / che l’arsiccio terreno gialloverde bruci" (L'agave sullo scoglio, ibid)

Le vent doux qui apporte la vie dans le verger, ou le sirocco dont la rage assèche et brûle la terre... Eugenio Montale, comme d'autres avant lui, avait eu l'intuition de la double nature du vent et son rapport avec l'être humain : tantôt hôte bienvenu et porteur de vie, tantôt enragé et nuisible. Mais laissons derrnière nous les recueuils de Montale, et plongeons dans la météorologie ! Comme souvent dans cette série, c'est le météorologue Luca Nisi qui nous guidera à travers les turbulences et les brises.

Qu'est-ce que le vent et quelles sont ses causes ?

Commençons par la base : le vent est un mouvement d'une masse d'air. "L'air a un volume et une masse propres, il est composé de particules de différents gaz, dont de la vapeur d'eau, et d'impuretés en suspension", explique Luca Nisi, "par leur mouvement, ces particules exercent une friction qui peut soulever de la poussière, déplacer des feuilles, et va parfois jusqu'à déraciner des arbres ou arracher le toit des maisons". Sur notre planète, le vent est principalement horizontal, c'est pourquoi le mot "vent" est utilisé pour désigner les mouvements d'air horizontaux. En revanche, les mouvements d'air verticaux sont plus rares : ils se produisent par exemple lorsque l'air est poussé vers le haut, soit parce qu'il rencontre un obstacle, soit en raison de la poussée d'Archimède : l'air chaud est moins dense et donc plus léger que l'air froid et a tendance à s'élever.

Pour en revenir au mouvement horizontal de l'air, la cause se trouve dans la différence de pression : "L'air a tendance à se déplacer d'une zone de haute pression vers une zone de basse pression. En effet, la nature, comme on l'observe souvent en météorologie, tente toujours de ramener à l'équilibre une situation déséquilibrée. Pensez par exemple à la chambre à air d'un vélo : quand elle est gonflée, la pression à l'intérieur est très élevée par rapport à la pression extérieure. Si on la perfore, l'air s'échappe dans l'atmosphère jusqu'à ce que la pression à l'intérieur soit égale à la pression à l'extérieur... le principe est le même. Élargissons à l'échelle de l'atmosphère : s'il n'y avait pas de mouvement de la Terre sur son axe, les mouvements des masses d'air iraient directement de zones de haute pression vers les zones de basse pression, et tout s'équilibrerait très vite, comme pour la chambre à air. Mais la Terre tourne, et on ne peut pas en faire abstraction : cette rotation provoque la force de Coriolis qui, avec d'autres forces en jeu, rend le mouvement des masses d'air beaucoup, beaucoup plus complexe", explique Luca Nisi.

Comment mesure-t-on le vent ?

Par convention, le vent est mesuré à l'aide d'un anémomètre, à une hauteur standard de 10 mètres, et l'instrument de mesure traditionnel est l'anémomètre à coupelles. "La fréquence de rotation de l'anémomètre à coupelles est proportionnelle à la vitesse du vent, ce qui permet d'en déduire facilement la vitesse en kilomètres par heure. En revanche, pour déterminer la direction du vent (on rappelle qu'en météorologie, la direction du vent est celle d'où il vient et non celle vers où il va), on utilise une girouette : la position de la girouette est déterminée par un potentiomètre, ce qui permet d'en déduire la direction en degrés cardinaux." MétéoSuisse utilise également des instruments plus modernes, en particulier en montagne où les conditions peuvent parfois être extrêmes en raison de la présence de neige et de glace, et où le traditionnel anémomètre à coupelles peut rencontrer certaines difficultés.

Ces anémomètres sont équipés de deux paires de capteurs à ultrasons, positionnées perpendiculairement. Comme beaucoup d'entre vous l'ont peut-être déjà remarqué, le mouvement des masses d'air a une incidence sur la propagation des ondes sonores. Par exemple dans une vallée, le bruit d'une rivière, d'une chute d'eau ou d'une voie ferrée peut être influencé par la direction et la vitesse du vent : en général, le bruit sera plus fort s'il est "porté" par le vent jusqu'à nous, et moins fort si le vent souffle dans l'autre sens. De la même façon, la propagation des ultrasons est influencée par le mouvement de l'air : ce principe est exploité par les anémomètres dits "soniques" ou "à ultrasons". En analysant les différences de temps de transit des signaux entre les différents capteurs, il est possible de calculer avec précision la direction et la vitesse du vent. Si l'on place ensuite une troisième paire de capteurs perpendiculairement aux deux autres, il est également possible de mesurer la composante verticale du vent et donc les turbulences, ce qui est fort utile dans les aéroports.

Autrefois, avant les anémomètres, la vitesse du vent pouvait être estimée à l'aide d'une échelle dont tout le monde a certainement entendu parler au moins une fois : l'échelle de Beaufort. Il s'agit d'une mesure empirique, et qui ne se fonde pas sur des instruments : la vitesse du vent est calculée à partir des effets sur l'environnement et les objets. Elle commence par le mouvement des feuilles d'arbres (7-11 km/h, force 2 sur l'échelle de Beaufort) et va jusqu'aux dommages importants et considérables causés aux structures (vitesses supérieures à 117 km/h, 12 Bf). Au quotidien, les prévisionnistes de MétéoSuisse utilisent dans leur bulletin météorologique une terminologie du vent comprenant cinq qualificatifs : faible, modéré, soutenu, fort, tempétueux.

Sur les cartes météorologiques, la vitesse du vent peut être représentée par une échelle de couleurs, ou bien par des symboles appelés "barbules" qui permettent de représenter aussi sa direction. Ce terme provient de l'ornithologie : une barbule est un petit crochet qui relie une barbe de plume d'oiseau à la barbe voisine. En météorologie, les barbules sont constituées d'une ligne droite de longueur fixe, dont l'inclinaison indique la direction du vent. À l'extrémité de cette ligne droite, dans la direction d'où vient le vent, la vitesse est codée par des lignes droites obliques ou des triangles qui sont dirigés vers la zone de basse pression. Une demi-droite correspond à 5 nœuds, une droite pleine à 10 nœuds et un triangle à 50 nœuds (1 nœud = 1,852 km/h). Cette description devient plus compréhensible avec un exemple graphique :

C'est tout pour ce premier volet consacré au vent... Prochainement, nous découvrirons quelques types de vent, du local au global.