Le Joran est un vent étroitement associé aux passages de fronts froids sur la Suisse, et résulte du brusque déversement de l'air polaire post-frontal sur le Plateau. En effet, l'air froid originaire de l'Atlantique et plus dense que l'air méditerranéen présent à l'avant de la perturbation, tend à s'accumuler sur la France voisine, créant une surpression à l'ouest du Jura. Lorsque cette différence de pression dépasse un certain seuil, l'air froid franchit le Jura et « tombe » sur le Plateau. En montant côté français le long des pentes du Jura, la masse d'air se sature et forme ce nuage applati caractéristique, lequel se dissipe immédiatement par compression au moment de la chute de la masse d'air sur le Plateau ; ceci explique les typiques éclaircies sur le Plateau occidental. Ces caractéristiques rendent le Joran brusque et turbulent, parfois violent et très froid en hiver. Si son occurrence se laisse assez bien prévoir dans ses grandes lignes, l’heure exacte de sa survenue ainsi que sa force dépendent beaucoup de facteurs locaux liés à la topographie.
Il existe une différence notable entre le Joran et le foehn. Si – comme le Joran – le foehn est un vent dynamique réagissant à un gradient de pression et à un soutien des vents d'altitude, c'est en revanche un vent « léger », de température potentielle élevée et qui, de ce fait, peine à atteindre les basses couches de l'atmosphère où l'air est plus dense. Il ne peut le faire que sous certaines conditions : soit une vigueur exceptionnelle, soit un lac d'air froid peu important dans les fonds de vallées, soit une instabilité marquée.
Le Joran ajoute à la composante dynamique bien présente une composante gravitaire. C'est en effet un vent « lourd » composé d'air froid et dense qui s'écoule naturellement vers le bas. En météorologie, on appelle cela un vent catabatique, dont le modèle par excellence est la brise nocturne de vallée.
On peut donc dire que le Joran est en quelques sorte une « avalanche d'air froid ». Il s'apparente donc bien plus à la Bora des côtes dalmates qu'au foehn dont il est pourtant voisin.

Le dimanche 15 janvier 2023 vers 05h, un front froid a abordé la Suisse romande ; l’image satellite associée à la carte des pressions au sol et de la position des fronts ci-dessous illustre cette situation :

Nous avons pu mesurer la différence de pression entre Besançon et Neuchâtel. Le graphique ci-dessous montre une évolution très nette, avec une surpression à Neuchâtel à l'avant de la perturbation (valeurs positives), puis un renversement du gradient et une surpression à Besançon (valeurs négatives). Comme on le voit sur le graphique, une fois l’advection froide accomplie sur le Plateau suisse, les pressions entre ces deux villes se sont rapidement égalisées, mettant un terme à la situation de Joran.



Cet exemple du 15 janvier est un peu gentillet, mais le Joran peut se montrer nettement plus furieux et dépasser allègrement les 100 km/h, voire les 120 km/h pour autant que la masse d’air soit très froide et le vent de nord-ouest en altitude vigoureux.
Une perturbation peu active touchera la Suisse lundi 26 juin. Dès lundi matin, l'afflux d'air plus froid en provenance de la France se mettra en place. Les cartes ci-dessous montrent respectivement la hausse de pression à l'arrière de la perturbation, l’évolution du gradient entre Besançon et Neuchâtel ainsi que la direction du vent dans la région des Trois-Lac.



Durant l'été, des rafales de Joran sont également associées aux orages se développant sur le Jura. Le principe est le même, l'afflux d'air froid et la hausse de pression étant cette fois provoqués par les courants descendants de l'orage. Une différence de taille en revanche, le Joran est nettement plus difficile à prévoir !