L’histoire de la météorologie aéronautique en Suisse est bientôt centenaire. Elle a commencé à la fin des années 1920 sur plusieurs aérodromes puis s’est développée au fil des ans. Les observations météorologiques étaient reportées sur des cartes pour être analysées et servir de base à la prévision du temps. Pendant des décennies, la personne qui observait transmettait les conditions du moment dans des messages codés et diffusés au niveau mondial, grâce à des systèmes de télécommunications spécifiques.
Les observations météorologiques répondaient au départ essentiellement à des objectifs climatologiques. Il s’agissait en effet de décrire le climat d’une région. Avec l’avènement de l’aéronautique, le besoin en matière de prévision météorologique s’est fait particulièrement pressant. La création de l’OACI en 1944 a permis de poser les bases de la réglementation. L’observation spécifique pour l’aéronautique a suivi. Les premières observations étaient assurées par les météorologues depuis le toit de l’ancien terminal de Genève-Cointrin.
1950 : Un nouveau poste dédié à l’observation météo
Dans les années 1950, un poste dédié à l’observation météo est érigé au bout d’une piste qui mesurait alors la moitié de celle d’aujourd’hui. Dans les années 1960, avec le prolongement de cette piste, un poste d’observation est construit près de Colovrex, à quelque distance du nouveau seuil de piste ; il subira quelques transformations et adaptations durant les décennies suivantes, avant d’être détruit à la faveur d’une nouvelle vigie en 2009.
La nouvelle construction, sur pilotis, atypique, pourrait s’apparenter à un instrument météorologique. Moderne, sa vigie épurée ne recevait plus qu’un pupitre avec de multiples écrans informatiques. Les observateurs/trices y ont travaillé 24h/24 et 365 jours par an.
Il faut savoir que tout aéroport international est soumis à la diffusion régulière des messages METAR, décrivant direction et vitesse du vent, visibilité, type de temps, quantité et bases des nuages, température, point de rosée et pression atmosphérique, ainsi qu’une prévision de tendance. Un certain nombre de ces paramètres a rapidement été mesuré et transmis de manière automatique. Jusqu’à récemment, quelques paramètres ne pouvaient qu’être estimés visuellement : c’était le cas de la visibilité, du type de temps (pluie, neige, grêle, brume, etc) et de la base des nuages. La qualité et la précision des appareils de mesure ayant inexorablement évolué, on a pu progressivement se passer de l’observation humaine. A l’automne 2016, le service de nuit a été supprimé. Suivra l’automatisation complète au printemps 2024, sous supervision à distance depuis la salle de prévision.
Philippe Roch, observateur depuis 2009 – Le charme du métier
« J’ai beaucoup apprécié cette activité et la relation avec l’environnement de l’aéroport. C’était un vrai privilège de pouvoir assurer la continuité des observations pendant toutes ces années, de suivre l’évolution du temps au fil des saisons. Je me rappelle d’un matin d’hiver où j’étais encore en formation. Je m’apprêtais à envoyer le METAR et mon regard s’est arrêté sur les valeurs des deux capteurs de vent situés à chaque extrémité de la piste.
Trois kilomètres séparent chaque instrument, le premier affichait entre 5 et 10 nœuds de secteur ouest et le second, à peu près la même valeur mais secteur nord-est. Cette convergence m’intriguait et je cherchais une explication, quand mon formateur me donna un indice, il s’agissait simplement de l’air froid qui avançait sur la piste. À cet instant, je n’avais pas imaginé que la progression de l’air froid, balayant l’air chaud sur son passage, puisse être suivi à l’aide des anémomètres. »
« Dans les bons moments, il y a aussi les levers du soleil aux couleurs flamboyantes, qui nous faisaient oublier les quelques heures de sommeil perdues. D’autres fois, c’étaient les virgas ou les arcs-en-ciel après le passage d’une perturbation ou encore le halo autour de la lune. Beaucoup d’instants magiques, d’émerveillements, faisaient le charme de cette activité. »
La suite des évènements s’inscrit dans l’optimisation technologique. Les améliorations de ces dernières années ne justifient plus la présence d’une personne sur le site puisque les observations automatiques répondent aux standards de sécurité aéronautique. Alors, la fonction va évoluer inexorablement, elle continue mais à distance… nous prenons du recul, derrière un rideau d’écrans, des caméras nous offrent un joli panorama du site. Il faudra s’y habituer et lâcher prise, peu à peu, en gardant peut-être un doigt sur le guidon pour se frayer un chemin dans cette voie numérique. »