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Aurores polaires visibles jusqu'en Suisse

MétéoSuisse-Blog | 27 septembre 2023
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Dans la nuit du 24 au 25 septembre, le ciel s'est teinté à plusieurs reprises de lueurs rougeâtres juste au-dessus de l'horizon septentrional. Il s'agissait d'aurores polaires, appelées aussi aurores boréales pour celles se produisant dans l'hémisphère nord. Un premier épisode de faible intensité s'était déjà produit au mois de mars dernier et au vu de l'activité solaire croissante, d'autres aurores polaires, plus intenses encore, pourraient bien se manifester à nos latitudes dans les semaines et mois à venir.

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Deux paroxysmes auroraux

La nuit du 24 au 25 septembre a été marquée par deux événements auroraux distincts, l'un vers 1 heure du matin, l'autre vers 4 heures du matin. Ces aurores boréales étaient suffisamment intenses pour être visibles jusqu'à nos latitudes. Dans les régions polaires, ces flambées aurorales se produisent généralement 3 à 4 fois par nuit. On parle dans ce cas de paroxysmes auroraux, pour les distinguer de l'activité aurorales de faible intensité, appelée aussi "fond auroral", qui persiste durant une bonne partie de la nuit. Ce fond auroral se manifeste par des lueurs plus diffuses, souvent à peine visibles à l'oeil nu. Par contre, ces aurores de faible intensité apparaissent plus nettement sur les écrans des caméras et appareils photos, généralement bien plus sensibles que l'oeil humain.

Formation des aurores polaires

Les aurores boréales sont causées par l'interaction entre le vent solaire, le champ magnétique terrestre et les gaz de la haute atmosphère de la Terre. Le vent solaire est un flux de particules (électrons, ions) produit en permanence par notre étoile. Ce vent solaire, potentiellement mortel, est dévié par le champ magnétique terrestre qui agit comme un véritable bouclier, mais qui permet toutefois à une partie de ces particules d'atteindre la haute atmosphère terrestre au niveau des pôles (sud et nord). Ce flux vient exciter les différents atomes qui composent l'atmosphère terrestre, tout comme un flux d'électrons vient exciter le gaz composant un tube néon. Cette rencontre a lieu entre 100 et 400 km d'altitude, voire jusqu'à 600 km d'altitude dans les cas extrêmes, et produit de la lumière dont la couleur dépend du type d'atome excité et aussi du niveau d'énergie du flux de particules. L'oxygène tend à produire la couleur verte alors que le rose est produit par l'azote. La couleur dominante est un vert très pâle. Toutefois, il convient de noter que les capteurs des appareils photo et vidéo tendent à sursaturer les couleurs des aurores boréales, rendant souvent le vert bien plus "pétant" que ne le perçoit l'oeil humain. De manière générale, plus le flux est énergétique, plus l'activité aurorale devient colorée.

Activité aurorale flamboyante sous l'influence d'éruptions solaires et de trous coronaux.

Nous l'avons vu plus haut, le soleil produit en permanence un flux de particule qui interagit avec le champ magnétique et la haute atmosphère terrestre. Ce vent solaire "souffle" à une vitesse généralement comprise entre 300 et 400 km/s. Cependant, la surface du soleil est parfois agitée par des trous coronaux et des taches solaires. Les premiers causent une nette accélération du vent solaire qui peut atteindre et dépasser les 700km/s. Lorsque cette accélération du vent solaire atteint la Terre, l'activité aurorale devient intense. Quant aux taches solaires, qui apparaissent comme des grains de beauté à la surface du soleil, elles donnent souvent lieu à des éruptions solaires. Celles-ci éjectent de la matière solaire vers l'espace interplanétaire, d'où leur nom d'éjection de masse coronale (coronal mass ejection ou CME). Ces CME viennent s'insérer dans le vent solaire comme de véritables perturbations bourrées d'énergie, plus puissantes que les flux issus de trous coronaux. Selon leur vigueur, ces CME atteignent la Terre dans un délai qui varie de 2 à 4 jours. L'arrivée de ces CME au voisinage de notre planète engendre souvent une onde de choc et des tempêtes magnétiques source d'aurores polaires flamboyantes et ce, jusque vers les latitudes moyennes.

CME et activité solaire

Le soleil connaît un cycle de 11 ans au cours duquel son activité varie entre un minimum et un maximum. Le cycle actuel a débuté en décembre 2019 et s'achèvera en 2031. Le pic d'activité devrait être atteint en 2025. L'activité de notre soleil se traduit visuellement par le nombre de taches qui parsèment sa surface et leur propension à produire des éruptions. Ainsi, dans sa phase minimale d'activité, l'astre du jour est dépourvu de taches alors que dans sa phase de forte activité, des dizaines de taches couvrent sa surface. Lors d'un maximum d'activité, les taches solaires sont donc nombreuses et les CME aussi. Le risque de tempêtes magnétiques génératrices de fortes aurores boréales s'en trouve donc augmenté. Les aurores issues de CME montrent souvent leurs draperies vert-pâle surmontées par une large plage rougeâtre. Les teintes rouges se manifestent lorsque les atomes d'oxygène sont excités par un flux à haute énergie vers 300 à 400 km d'altitude.

Minimum solaire et trous coronaux

Nous l'avons vu plus haut, l'activité aurorale peut être exacerbée par de forts vents solaires générés par les trous coronaux.

Lors des pics d'activité du cycle solaire, ces trous coronaux tendent à se regrouper vers les pôles du soleil et deviennent donc un peu moins géo-effectifs. C'est-à-dire que les forts vents solaires qu'ils provoquent visent moins la Terre. Par contre, lorsque le soleil s'approche de son minimum d'activité, les trous coronaux descendent en latitude et peuvent produire de forts vents solaires dirigés vers la Terre. De ce fait, grâce aux trous coronaux, des flambées aurorales demeurent possibles lors d'un minimum solaire, et ce malgré l'absence de taches solaires. Ces aurores sont généralement vert pâle avec une draperie garnie d'une frange inférieure rose-violacée très vibrante.

Vidéo d'aurores boréales en temps réel liées à des trous coronaux filmée dans le nord de la Norvège et en Finlande. Le liseré rose typique est bien apparent sur la fin de la vidéo. Les couleurs de cette vidéo sont très proches de ce que perçoit l'oeil humain.

Source : Dean GILL

Activité solaire en hausse avec d'autres aurores visibles en Suisse à la clé

L'activité solaire poursuivra sa hausse jusqu'au pic de 2025. De ce fait, les CME devraient devenir encore plus fréquentes et générer d'autres tempêtes magnétiques. Celles-ci pourront parfois produire des aurores polaires jusqu'aux latitudes moyennes, c'est-à-dire aussi en Suisse. Elles pourront être encore plus marquées que celles observées jusqu'à présent et il n'est pas impossible que la couleur verte apparaisse sous la plage rougeâtre. A ce moment-là, la question sera de savoir si nous bénéficierons d'un ciel dégagé, condition sine qua non pour pouvoir admirer la danse des aurores boréales.

Tempêtes magnétiques dangereuses pour l'activité humaine

Les tempêtes magnétiques déclenchées par des CME ne se contentent pas de produire de belles aurores boréales aux couleurs chatoyantes, elles sont en mesure de perturber les communications radio et de mettre à mal le réseau électrique. En Amérique du Nord, territoire plus exposé que l'Europe en raison de sa latitude magnétique plus septentrionale, de gigantesques pannes de courant furent causées par des tempêtes magnétiques dans un passé proche.

L'événement de Carrington de 1859, un cas extrême

Vers la fin du mois d'août 1859, une violente tempête magnétique a fait rage sur la Terre à la suite de l'arrivée de puissantes CME très rapprochées. Lors de cet événement, les aurores polaires se montrèrent jusqu'aux tropiques et le télégraphe se mis à fonctionner tout seul par induction en raison du fort champ magnétique ambiant. De nombreux télégraphistes furent électrocutés lors de cet épisode. L'on considère que ce type d'événement a une période de retour d'environ 150 ans. Un tel événement extrême aurait des conséquences bien plus importantes aujourd'hui qu'en 1859 en raison de notre plus grande dépendance au réseau électrique et de nos systèmes de communications sophistiqués.