L’expérience de Benjamin Franklin en 1752, ayant fait voler durant un orage un cerf-volant équipé d'un paratonnerre est assez notoire. On a plus rarement entendu parler de l’utilisation de cerfs-volants équipés d’instruments aux débuts de la recherche météorologique.
Très tôt dans le développement de la météorologie, on a constaté que les processus météorologiques importants se déroulaient en altitude et non au sol. Les relevés au sol ne suffisaient pas à expliquer les processus et les phénomènes météorologiques. C'est pourquoi, dès les débuts de la recherche météorologique, on s’est efforcé d’envoyer des instruments de mesure dans des couches d'air plus élevées.
L'une des solutions consistait à suspendre des instruments à un ballon captif. Une fois le ballon redescendu par la corde, les données de mesure enregistrées pouvaient être analysées. A partir des années 1930, avec l'avènement de la radiocommunication, on s’est mis à utiliser des ballons météorologiques en vol libre équipés de radiosondes, comme c'est encore le cas aujourd'hui (par exemple à Payerne). C'est ainsi qu'est née une branche spécifique de la météorologie : l'aérologie.
Les cerfs-volants météorologiques sont une variante aujourd'hui presque tombée dans l'oubli pour effectuer des mesures en altitude. A l'aide de grands cerfs-volants, des instruments de mesure de la température, de l'humidité, de la pression atmosphérique et de la vitesse du vent étaient emmenés dans des couches d'air plus élevées. C'est ainsi que de nombreuses stations de cerfs-volants ont vu le jour au début du 20e siècle, comme par exemple à Lindenberg en Allemagne, où le record mondial d'altitude a même été établi en 1919 avec 9750 mètres ! Les cerfs-volants météorologiques étaient à l'époque plus souvent utilisés que les ballons captifs, car ils étaient moins chers.
Le 1er avril 1908, une station de cerfs-volants a été créée à Friedrichshafen, au bord du lac de Constance, par Ferdinand von Zeppelin, avec le soutien du roi de Wurtemberg. Von Zeppelin avait surtout besoin de mesures plus précises en altitude pour le décollage et l'atterrissage de ses dirigeables. Comme les vents faibles dominent généralement dans la région du lac de Constance, les cerfs-volants ne pouvaient pas être simplement lancés devant la station, comme par exemple à Lindenberg. A l'instar d'un enfant qui court dans un pré et fait voler son cerf-volant en le tirant, sur le lac de Constance, le cerf-volant météorologique était soulevé à partir d'un bateau rapide. Un bateau, le GNA, fut spécialement construit à cet effet. Propulsé par une machine à vapeur à trois cylindres de 350 chevaux, le GNA, long de 27 mètres, atteignait une vitesse maximale de près de 40 km/h.
Les lancements à partir du GNA avaient généralement lieu au milieu du lac de Constance ou, par vent d'ouest, devant la rive suisse (moins de vagues). En règle générale, les cerfs-volants météorologiques montaient jusqu'à environ 3000 mètres d'altitude, plus rarement jusqu'à 6000 mètres. Une ascension durait environ une heure. Une fois les appareils d'enregistrement récupérés, les données enregistrées pouvaient être analysées. Les données étaient immédiatement envoyées par télégramme aux services météorologiques des environs et utilisées pour les prévisions météorologiques. Le GNA n'était pas seulement le point de lancement de cerfs-volants météorologiques, mais aussi de ballons captifs les jours de vent faible. Outre les mesures météorologiques, le GNA effectuait également des mesures limnologiques. Après 1935, la station de cerfs-volants et le navire de lancement des cerfs-volants ont perdu de plus en plus d'importance en raison des progrès technologiques. Le GNA a été endommagé lors du bombardement de Friedrichshafen en avril 1944, puis réparé. Il ne fut cependant plus jamais vraiment utilisé et fut définitivement mis à la ferraille en 1954.
Les données des ascensions de cerfs-volants et de ballons captifs ne servaient pas seulement à établir des prévisions. Elles permettaient également d'étudier les conditions météorologiques et de vent locales sur le lac de Constance (voir le dernier encadré).
Pour les ascensions de cerfs-volants, le GNA disposait de 3 treuils équipés chacun de 10 km de fil (0,6-0,8 mm de diamètre). Pour que le cerf-volant puisse s'envoler, le GNA devait accélérer jusqu'à une vitesse d'au moins 25 km/h. Pendant l'ascension, un cerf-volant était accroché tous les 1000-2000 mètres.
Traduction d'un blog publié samedi 9 septembre par nos collègues allémaniques