Après le déluge catastrophique en Emilie-Romagne, la pluie n'a pas encore dit son dernier mot en Italie du Nord. Cette fois-ci c'est le Piémont voisin de la Suisse qui sera en première ligne. Ces fortes précipitations empièteront en partie sur le territoire helvétique en touchant, dans une moindre mesure, le massif du Mont-Rose et la région du Simplon.
La valse des gouttes froides que nous évoquions dans un récent blog continue de faire parler d'elle. En effet, les fortes pluies catastrophiques qui se sont produites en première partie de semaine dans la région d'Emilie-Romagne en Italie sont directement imputables à l'une d'elles. Et ce n'est pas tout, la nouvelle situation de fortes précipitations qui se profile pour la région du Piémont, toujours en Italie, est aussi associée à une situation de goutte froide.
Si vous aviez prévu de passer le pont de l'Ascension au sud des Alpes et notamment dans le Piémont occidental, le temps se montrera fortement pluvieux dans ce secteur, notamment en partant du débouché de la Vallée d'Aoste jusqu'au secteur du Mont Viso. Ces nouvelles pluies sont causées par un courant d'est qui s'est établi sur la plaine du Pô à l'avant d'un vaste cut-off qui s'étire de l'Algérie au sud-ouest de la France. C'est de l'air très humide qui est drainé de l'Adriatique au contreforts des Alpes occidentales. Cette barrière montagneuse oblige ainsi l'air à s'élever ce qui forme des nuages et de la pluie, d'où le nom de "situation de barrage". Le flux d'est sera donc dirigé principalement vers les Alpes Piémontaises, mais le secteur sud-est des Alpes valaisannes, du Simplon au massif du Mont-Rose, sera aussi concerné. Toutefois, en raison de la faiblesse des vents en altitude, le versant nord des Alpes valaisannes ne devrait pas être touché. Ce sera essentiellement le versant italien du Mont-Rose qui recevra d'abondantes précipitations. Quant au versant sud du Simplon (région de Gondo), il sera moins impacté en raison de l'orientation très est du flux. Dans cette région, il faut un fort courant du sud-est humide pour produire de fortes précipitations. Néanmoins, au vu de ce qui précède, MétéoSuisse a émis un avis de fortes pluies de degré 2 (jaune) pour les secteurs frontaliers allant du Mont Rose au Simplon.
Les pluies, qui ont déjà débuté, se poursuivront durant toute la journée de samedi, pour s'achever dimanche à la mi-journée. Durant cet événement, des cumuls dépassant les 200 mm sont probables avec des pointes pouvant localement dépasser les 300 mm, soit 300 litres d'eau par mètre carré!
Il convient de préciser que même si ces nouvelles fortes précipitations concerneront le même bassin fluvial qui a été touché mardi dernier lors de l'épisode d'Emilie-Romagne, à savoir celui du Pô, ce n'est pas la même région qui subira ces fortes pluies. En effet, le centre dépressionnaire étant placé plus à l'ouest, c'est le bassin du Pô occidental qui recevra le gros des pluies.
Les fortes pluies qui ont affecté une bonne partie de l'Emilie-Romagne mardi et mercredi dernier ont eu un déroulement un peu différent de celui qui s'annonce pour le Piémont. Toutefois, on peut noter quelques similitudes entre les deux situations comme l'afflux d'air humide venant de l'Adriatique (procuré par le sirocco) et la situation de barrage provoquée par le relief local, à savoir l'Appenin tosco-émilian. Toutefois, un autre élément est venu exacerber l'activité pluvieuse, c'est la convergence entre le sirocco soufflant du sud-est et la bora venant du nord-est. Cette ligne de convergence de vents forts est venue se bloquer devant le littoral de la Romagne entre Ravenne et Rimini. Au nord de cette ligne, nous avions une bora qui avait eu le temps de s'humidifier en transitant sur l'Adriatique, alors qu'au sud de la convergence affluait un sirocco qui avait parcouru la totalité de l'Adriatique, se chargeant ainsi de grandes quantités d'humidité. La proximité du centre de la goutte froide sur l'Italie centrale avec son air froid d'altitude a favorisé l'instabilité de la masse d'air et la formation d'orages noyés dans la masse, ce qui a bien évidemment renforcé localement l'activité pluvieuse.
Il faut bien l'avouer, cette situation de gouttes froides a bien du mal à se décanter et les différents modèles météorologiques laissent entrevoir la poursuite de cette situation jusqu'au mois de juin pour le bassin méditerranéen avec toujours le risque de fortes pluies régionales, pas forcément dans les mêmes régions qui ont subi des pluies catastrophiques. En ce qui concerne la Suisse, elle devrait se retrouver en bordure de la zone dépressionnaire, mais s'agissant de gouttes froides, l'incertitude demeure.