Vous êtes nombreux à vous demander ce que les barres transparentes sur les prévisions de précipitations signifient. Même si une explication de ce graphique est fournie sur notre App, nous proposons dans ce blog un guide d’interprétation avec l’exemple de la prévision de cette semaine.
Vous êtes probablement conscient que toute prévision, la météo n’échappe pas à cette règle, comporte une incertitude. Pour cette raison, MétéoSuisse a décidé de fournir une estimation de cette incertitude. Sachant que les probabilités et les statistiques peuvent être parfois difficiles à comprendre, et éveillent peut-être en vous de lointains et mauvais souvenirs, nous tentons de communiquer cette incertitude de la manière la plus intuitive possible. En effet, sans même calculer des probabilités, nous sommes constamment en train d’évaluer des risques ou des scénarios alternatifs dans la vie de tous les jours. Par exemple, en partant en randonnée, vous prenez peut-être un kit de secours. Vous n’avez pas prévu de vous blesser, mais vous estimez que le risque est suffisamment important donc vous emmenez le kit avec vous. Votre objectif est peut-être de faire une grande randonnée, mais vous prévoyez un itinéraire bis « au cas où » : un scénario alternatif. Cet exemple montre que sans faire des calculs compliqués de probabilité, vous anticipez différents scénarios dans votre quotidien. C’est pourquoi nous pensons, que même sans comprendre les probabilités, vous prendrez des meilleures décisions avec des informations sur l’incertitude des prévisions météo, car vous êtes habitués à le faire. La difficulté réside dans la communication de cette information probabiliste sur les prévisions : autant simple que possible, mais aussi précis que nécessaire. Ce blog est justement là pour faciliter cette communication.
L’évolution du temps qu’il fait dépend surtout des conditions initiales : une petite perturbation peut créer des grandes différences dans l’évolution de la météo, c’est l’effet papillon. Malgré des systèmes de mesures de plus en plus précis et complets, l’état initial de l’atmosphère n’est jamais connu parfaitement. De même, malgré des modèles météorologiques de plus en plus précis, certains processus sont mal pris en compte (l’atmosphère est tellement complexe et c’est ça qui la rend fascinante !). De ce fait, nous faisons tourner nos modèles météo non pas une fois, mais plusieurs fois, en perturbant légèrement les conditions initiales et les processus physiques. Cela nous donne donc plusieurs scénarios possibles, au lieu d’une seule prévision : on peut évaluer quel est le « pire des cas » et quel est le « meilleur des cas ». Parfois ces scénarios sont similaires : la prévision est fiable. Parfois, ils sont très différents : la prévision est incertaine et il faut évaluer les différents scénarios (et rester humble face à Mère Nature!). Vous trouverez plus de détails sur les prévisions probabilistes dans ce blog.
Prenons l’exemple de la prévision de pluie cette semaine pour le chef-lieu vaudois. La Figure 1 montre la prévision de température et de pluie entre lundi et mardi. Ce graphique vous est très probablement familier, mais est-ce que vous vous êtes déjà demandé ce que signifient ces barres de différentes couleurs et parfois même transparentes ? Nous allons démystifier tout cela ensemble. La barre de couleur représente la médiane : c’est-à-dire que la moitié des scénarios montrent des pluies plus intenses et l’autre moitié des pluies plus faibles. On peut interpréter cette valeur comme la meilleure estimation des quantités attendues. Les barres transparentes représentent le « pire des scénarios auquel on peut raisonnablement s’attendre ». Formellement, il y a 90 % de chance de ne pas dépasser cette intensité de pluie (il s’agit du quantile 90%, plus d’informations dans ce blog). Pour la prévision de lundi et mardi (Figure 1), on peut donc dire que le risque de pluie est faible avant 16 h (il n’y a pratiquement que des barres transparentes) et que même s’il pleut, l’intensité sera faible (les barres transparentes s’élèvent jusqu’à maximum 1 mm/h). Par contre entre lundi soir et mardi matin, il est probable qu’il pleuve avec une intensité d’environ 1 mm/h (cela correspond à 1 litre par mètre carré durant 1 h). Les scénarios les plus pessimistes montrent environ 2 à 3 mm/h (les barres transparentes). A savoir que l’incertitude d’une prévision est une combinaison d’une incertitude de la localisation du phénomène, de son intensité et de son horaire. Il n’est pas possible de distinguer qu’est ce qui contribue le plus à cette incertitude en regardant simplement une prévision pour une localité. C’est pourquoi il est important d’également lire notre bulletin météo, car nous régionalisons la prévision et nous résumons quels sont les paramètres incertains.
Une information supplémentaire est représentée sur la Figure 2 : la quantité minimale de pluie à laquelle on peut raisonnablement s’attendre (les barres très foncées, par exemple où il y a l’étoile rouge). Formellement, celà veut dire qu’il y a 90 % de chance qu’il pleuve au moins la quantité indiquée (il s’agit donc du quantile 10%). C’est pourquoi on peut dire que dans la nuit de jeudi à vendredi, il est pratiquement sûr qu’il pleuvera au moins environ 1 mm/h. Il pourrait même pleuvoir jusqu’à 4 à 5 mm/h (barres transparentes). La meilleure estimation des quantités est d’environ 2 mm/h dans la nuit.
La Figure 3 montre qu’il y a beaucoup d’incertitude dans le risque et la quantité de pluie entre jeudi et vendredi : il pourrait pleuvoir entre jeudi matin et vendredi soir des quantités jusqu’à 4 mm/h, mais comme les barres de couleurs montrent des quantités très faibles, cela veut dire qu’il y a un écart important entre les différents scénarios. En résumé, le risque est bien là, mais il y a encore beaucoup d’incertitudes sur les quantités et l’horaire. En effet, les barres transparentes ne veulent pas dire que le « pire des cas auquel on peut raisonnablement s’attendre » est qu’il va pleuvoir en continu de jeudi matin à vendredi soir. Souvenez-vous : cette incertitude est une combinaison de la quantité, de la localisation et de l’horaire. En réalité, pratiquement tous les scénarios montrent des précipitations entre jeudi et vendredi, car un front froid devrait passer, mais l’horaire de son passage est encore incertain. C’est dans ce genre de cas que le bulletin météo amène une vraie plus-value, on y lit d’ailleurs pour jeudi (état du 13 novembre à 15 h): « Une zone de précipitations devrait traverser le pays par l'ouest. Son horaire est encore incertain: des pluies sont déjà possibles le matin, mais deviennent de plus en probables en fin de journée et dans la nuit de jeudi à vendredi. » Dans ce cas-là, l’incertitude ne réside pas tant dans l’occurrence ou non des précipitations, car il est très probable qu’un front froid passe, mais plutôt dans l’horaire.
En espérant avoir un peu démystifié ce graphe de prévision de pluie, l’auteur de ce blog s’en va profiter des derniers rayons de soleil avant une semaine nuageuse et souvent pluvieuse.